Une direction et un actionnaire sourds au contexte économique et social

Cette année, sous prétexte de crise sanitaire, la direction Manpower France n’a pas hésité à se servir généreusement sur le corps social de l’entreprise :

  • 0 € de participation.
  • aucune prime covid pour redonner du pouvoir d’achat et récompenser les efforts demandés.
  • de très fortes pressions voire abus sur les congés payés.
  • En cohérence avec l’absence de considération portée au fait social, la direction Manpower France n’a pas hésité à faire appel aux fonds publics en 2020, pour obtenir 50 000 000 € d’aide de nos impôts à tous pour financer nos salaires intérimaires et permanents, par de l’activité partielle (en 2020 : 85% de l’indemnité de chômage partiel était payée par l’État, les 15% restants étant généralement payés par des entreprises clientes de l’entreprise). Cet usage abondant du chômage partiel a permis à la société Manpower de conserver ses fonds propres, probablement dans l’objectif de constituer un fond pour les dividendes des actionnaires...

Spécifiquement côté intérimaires :

  • Concernant les collègues intérimaires en CDII : CP et RTT imposés, avant de les mettre au chômage partiel voire de les licencier pour faute leur refusant la rupture conventionnelle.
    En cette année en 2021, les collègues intérimaires en CDII font dans l’entreprise l’objet par milliers de honteuses campagnes de licenciements pour soi-disant fautes graves. Ces licenciements résultent de consignes de l’entreprise de leur demander de provoquer des abandons de poste pour les licencier pour faute grave, afin de ne pas leur payer les primes de licenciement ni les préavis (la prise en charge de l’activité partielle par l’État a en effet diminué à 70% et les CDII ne sont plus chez les clients, donc les 30% restants sont désormais à la charge de l’entreprise). Ceci, afin de les faire rejoindre les autres dizaines de milliers d’intérimaires anciennement en contrat de travail temporaire, déjà eux dans les rangs des chômeurs depuis 2020. À la bonne grâce là encore des comptes publics de l’assurance chômage. Et paradoxalement l’entreprise met la pression sur les agences dans la course à faire signer des nouveaux contrats CDII en volume.

Spécifiquement côté permanents :

  • fortes pressions à tous les permanents de poser au moins 10 jours de RTT et le maximum de congés pendant le premier confinement, sans considération des accords d’entreprise.
  • 5 millions d’euros de part variable non redistribués aux salariés permanents qui ont vu leur rémunération baisser ; si effectivement les salaires des permanents ont été maintenus en net, reconnaissons ce point à l’employeur, il n’en va pas de même des primes commerciales et des primes sur objectifs qui ont globalement fondu comme peau de chagrin... malgré l’investissement de tous.
  • aucune indemnisation des frais engagés pour le télétravail, ni de matériel octroyé à cet effet.
  • une enveloppe de rémunération indigente à l’occasion des négociations annuelles 2021.

Une indécence financière prédatrice, au service de la voracité de l’actionnaire

Partage des richesses en 2020 selon la direction Manpower
Enveloppes comparées des allocations de moyens dans le partage des richesses chez Manpower France en 2020.

En 2020, la CFTC-intérim avait écrit à l’actionnaire américain pour demander un effort :

  • des dirigeants sur leurs très hauts salaires,
  • et de l’actionnaire sur la redevance de marque versée aux États-Unis, car son mode de calcul pénalise l’entreprise les années de crise en sanctuarisant le montant minimum versé (cette redevance sert de coût de transfert pour de l’optimisation fiscale agressive) :
    Celui-ci avait refusé.

Inversement, c’est la fête constante pour cet actionnaire américain, qui s’il n’a eu aucune considération pour les salariés, s’est quant à lui généreusement attribué 281 000 000 € de dividendes en 2021 sur l’exercice 2020 (160 000 000 € en 2018). Une annonce faite en Comité Social et Économique Central (CSEC) choquante, quand nous observons que les permanents sont montés en première ligne pour assurer le télétravail pour les agences, que ces dernières ont maintenu par tous les moyens leur actions commerciales dans un contexte sanitaire et économique difficile, sans parler des intérimaires qui ont continué à assurer leurs missions.

À savoir par ailleurs, que l’entreprise Manpower France est adossée à 1,2 milliards d’euros de fonds propres, qui n’ont été accumulés que pour neutraliser la participation des salariés [1]. Ces 1,2 milliards d’euros sont essentiellement composés quasi pour moitié de primes CICE et pour l’autre moitié de réductions de cotisations sur les bas salaires, non investis dans l’amélioration de la performance : l’emploi, la revalorisation des salaires, la formation, l’investissement technologique, ... . à noter également que ces sommes importantes sont sorties du compte d’exploitation des agences pour en dégrader leur rentabilité et plomber les rémunérations variables des salariés permanents en agence.

Pour rappel, si l’activité de l’intérim chute lors des crises, il ne faut pas oublier qu’à chaque fois les entreprises de travail temporaire les traversent sans grande difficulté du fait :

  • qu’elles n’ont que très peu de frais fixes (près de 8% de frais fixes, à comparer avec ceux de près de 80% dans l’industrie automobile) ;
  • les plans sociaux se font automatiquement pour 80% de l’effectif salarié (salariés en contrat de travail temporaire), seuls les CDII et les permanents bénéficiant de contrats durables (avec la réserve des pratiques de licenciements abusifs ci-avant évoquée) ;
  • elles bénéficient les premières des reprises d’activité pour alimenter leurs résultats.
    A noter pour cette année, que la direction souhaite réembaucher des milliers de personnes en « CDII apprenant », nouveau dispositif permettant de réembaucher… en payant cette fois-ci les salaires par les fonds de la formation professionnelle : si la démarche est plus louable économiquement, elle prend pour la direction Manpower, la forme d’une nouvelle aubaine financière.

La CFTC-intérim appelle les salariés permanents à la sanction et/ou boycott lors de la prochaine enquête sociale

Au vu de cette morgue financière, de ce mépris pour les salariés et la collectivité nationale, la CFTC invite chaque salarié permanent à la rentrée prochaine, à répondre le plus négativement possible à toutes les questions relatives aux pratiques de gouvernance et d’éthique dans l’entreprise, ou bien à ne pas y répondre. C’est en effet le droit de chacun, même si les manageurs ont l’habitude de relancer ceux qui ne répondent pas à l’enquête sociale (les réponses individuelles sont anonymes, pas le fait d’avoir participé ou pas).

La CFTC réaffirme la nécessité d’un partage équitable des richesses encore plus en période de crise, de remettre les valeurs humaines au cœur de notre société

Les efforts et sacrifices des salariés avaient été rappelés par la CFTC lors de la NAO de cette année (voir notre article dédié).
L’employeur n’avait pas souhaité nous entendre et a mis en place des mesures que nous jugeons insuffisantes, car un tiers de nos bénéfices devrait être alloué à récompenser les salariés intérimaires et permanents de leur travail.
Lors de la négociation, la délégation avait interpellé la direction sur le fait que la crise sanitaire et la perte de prime associée faisait qu’il y a de plus en plus de dossiers y compris de salariés permanents qui arrivent en commission Entraide. Nous avions demandé un plus gros effort sur les salaires les plus bas. Réponse choquante de la direction : « l’entraide est là pour ça ». Manpower a conscience d’avoir créé des salariés pauvres et attend de la part des œuvres sociales des Comités Sociaux et Économiques (CSE) de corriger le tir. Une honte !
Encore une fois, la priorité est donnée seule aux actionnaires, qui n’ont pourtant pris aucun risque sanitaire ni fourni aucun effort, au détriment de ceux qui produisent les richesses, salariés permanents ou intérimaires, à qui tous les efforts ont été demandés, y compris le sacrifice de jours de congés et de jours de réduction de temps de travail.


Voir aussi :