Ajout du 20/07/2018 :

La décision du la Cour de Cassation du 12 juillet 2018 a effectivement causé un trouble certain au sein de l’organisation patronale Prism’Emploi ainsi que nous le soulignions dans la première version du présent article il y a quelques jours (voir ci-après).

Les organisations patronales ne savent que faire...

À ce stade, ne souhaitant pas satisfaire à l’arrêt pourtant clair de la Haute Cour qui a considéré le CDI Intérimaire illégal au motif que les partenaires sociaux ne peuvent faire lois, elle sollicite une interprétation du Conseil d’Etat pour savoir si l’arrêt d’extension rendu par le ministère du travail le 6 mars 2014 vaut loi.
Elle sollicite également le Conseil d’Etat pour savoir si la loi Rebsamen du 19 août 2015 permet également de considérer que le CDI Intérimaire est couvert par une loi. Cet argument a été écarté par la Haute Cour.

Ces procédures vont prendre du temps, d’autant plus que la Haute Cour ayant tranché, le Conseil d’Etat, si il souhaitait contredire la Cour, devrait prendre arbitrage auprès du Tribunal des Conflits....

Il est donc urgent d’attendre...

Dans l’intervalle, jouant de ses leviers auprès d’un gouvernement toujours à la seule écoute du patronat, les députés ont adopté un amendement déposé par Carole Grandjean, députée LREM de Meurthe-et-Moselle, visant à intégrer au code du travail les CDI intérimaires. Ce texte a été adopté à l’occasion de l’examen du projet de loi « Avenir professionnel » mercredi en nouvelle lecture. Le texte doit être débattu en séance publique à partir du 23 juillet.
Nul doute que la députée s’est faite particulièrement aidée, au vu de la faiblesse des délais et de la particularité du sujet, par le Prism’Emploi.

Il faut également rappeler que ce type de contrat était sous le coup d’une expérimentation introduite par la loi Rebsamen, qui arrive à son terme le 31 décembre 2018.

La CFTC reste attentive à cette actualité...

... et attends les textes de loi concernant le CDI Intérimaire en espérant, sans trop d’espoir au vu de la tendance du gouvernement actuel, que les textes finaux ne dénatureront pas la position d’équilibre fragile qui résultait de la négociation collective.
Nous avons toujours considéré que le CDI Intérimaire devait être amélioré mais il est à craindre que le projet de loi le fasse régresser.


Article initial du 14/07/2018 :

Pourquoi la Cour de Cassation a-t-elle déclaré illégal les CDI intérimaires fondés sur l’accord de branche instaurant cette disposition en 2013 ?

La décision rendue par la cour de cassation résonne comme un coup de tonnerre sur le travail temporaire. Cette dernière vient en effet de juger illégal le CDI intérimaire dans son arrêt ci joint, en réponse au pourvoi formulé par le syndicat FO.
Elle s’appuie sur le fait que les organisations syndicales et patronales ne peuvent aller au delà de la loi en créant un nouveau type de contrat de travail, ce qu’est manifestement le CDI intérimaire, hybride entre le CDI et le Contrat d’Intérim.
Le CDI intérimaire aurait ainsi du résulter d’une loi et non pas d’un accord de branche.

Les négociateurs de branche CFTC avaient déjà soulevé ce point lors des négociations avec l’organisation patronale Prism’Emploi, mais avaient préféré ne garder que les cotés positifs de ce contrat, certes imparfait et donc perfectible quant à la situation de précarité des intérimaires, plutôt que de le faire annuler. Telle n’a pas été la démarche de tous les syndicats.

La Cour de Cassation ajoute que l’argumentaire qui avait été soulevé par l’organisation patronale Prism’Emploi sur la prise en compte du CDI intérimaire par le législateur dans la loi N°2015-994 du 17 août 2015 ne pouvait s’appliquer ici, puisque la loi était postérieure à l’action en justice contre le CDI intérimaire.

Arrêt n°1337 - Cour de cassation du 12 juillet 2018

Quelles sont les conséquences de cet arrêt de la Haute Cour ?

De manière claire, les CDI intérimaires conclus entre 2013 et le 17 août 2015 sont illégaux et donc annulés.

Une question reste posée, si la Cour de Cassation a rejeté l’argument visant à faire écarter la loi du 17 août 2015 dans son arrêt, doit-on comprendre que les CDI intérimaires conclus postérieurement à cette date sont valable dans l’hypothèse d’une nouvelle action en justice ?

Quelles sont les conséquences de cette annulation pour les intérimaires en CDI intérim ?

Dans l’immédiat, il faut que l’employeur se positionne sur les CDI intérimaires postérieurs au 17 août 2015. L’employeur prendra t-il le risque de voir ces contrats cassés ou pas ?

Si l’employeur prend ce risque, il est probable qu’il ne sollicite que les intérimaires ayant conclu un contrat antérieur au 17 août 2015 pour leur en faire signer un nouveau et régulariser leur situation. Pour les contrats postérieurs à cette date, il continuera de les faire vivre.
Sinon, il choisira de refaire passer tous les CDI intérimaires en contrat d’intérim classique.

Concrètement, que signifie l’annulation de mon contrat ou le fait de repasser en intérim classique ?

Comme vous le savez, le CDI intérimaire ne permet pas le versement de l’indemnité de fin de mission ni de l’indemnité compensatrice de congés payés.
Si votre contrat est annulé ou si l’employeur vous fait repasser en intérim classique, il est possible que vous ayez moins gagné pendant votre CDI intérimaire et vous devez faire un calcul.
Si, après calcul, vous vous apercevez que le total des montants de ces indemnités pour chaque mission effectuée depuis le début de votre contrat en CDI intérim est inférieur à ce que vous avez perçu au titre de la GMMR et des congés payés sur la même période, vous pouvez aller devant le Conseil de Prud’hommes pour réclamer la différence.
Attention néanmoins, le fait de se voir proposer des missions reste soumis au pouvoir de l’employeur, aller aux Prud’hommes est-il une bonne idée en regard des conséquences possibles ?

Dans l’immédiat, prenez conseil auprès de votre agence d’intérim pour savoir ce que l’employeur a choisi de faire. Laissez lui néanmoins le temps d’y réfléchir...


Voir aussi :