Si nous considérions comme une réelle avancée pour la branche du Travail Temporaire le fait de pouvoir discuter et négocier le sujet du tutorat intérimaire , en rappelant le bien fondé et l’utilité de développer celui-ci au profit de l’accompagnement et du soutien des salariés qui entrent en formation dans notre secteur d’activité, nous considérons que cette proposition d’accord est très loin du minimum requis pour un aboutissement.

Le tutorat : une mission exigeante pour professionnel expérimenté

En effet, le texte du préambule nous indique que « le tutorat exercé par les salariés les plus expérimentés peut notamment contribuer au maintien dans l’emploi des séniors », « …en ouvrant pour le salarié expérimenté de nouvelles perspectives de diversification des parcours, en lui permettant de maintenir et d’enrichir ses compétences, en valorisant sa qualification et son expérience et en lui apportant une reconnaissance accrue. ».
Le tutorat constitue effectivement une forte responsabilité et un réel engagement du tuteur à l’égard des personnes tutorées. Pourtant, force est de constater, dans cette proposition d’accord, l’absence de toute mesure concrète de considération ou d’attractivité, pour l’exercice de cette fonction.

Absence de mesure concrète permettant de reconnaître la fonction de tuteur

Alors que la valorisation de la fonction de tuteur constitue une exigence pour la CFTC, celle-ci n’apparaît symboliquement que de pure forme dans le texte :

  • dans sa partie de l’article 4.2, dernier paragraphe, « L’entretien préalable à l’organisation du tutorat donnera lieu à une indemnisation forfaitaire globale, égale à une heure du salaire de base calculé sur le salaire de la dernière mission, lorsqu’il aboutit à la conclusion d’un contrat de mission… »,
  • à l’article 5.3 « valorisation du tutorat » qui entend ouvrir un « droit d’acquisition au DIF conventionnel, à raison de 2 heures de DIF pour 150 heures travaillées en mission tutorale. ».

La demande de valorisation du tutorat par la CFTC n’est que la juste reconnaissance du niveau d’exigence portée sur le tuteur, qui doit être un salarié très expérimenté dans son métier. Le texte confirme d’ailleurs cet argument de l’excellence dont devra faire preuve le futur tuteur dans l’article 1.1 : « Cependant, l’expérience, le savoir-être, les savoir-faire, les compétences techniques et la motivation à transmettre, restent les qualités essentielles et attendues pour être tuteur. ».

Malgré les différentes propositions concrètes faites par les partenaires sociaux, le Prisme refuse toujours de prendre en compte le poids de la responsabilité et de l’engagement du salarié dans le tutorat.

Absence totale de cadre régissant le recours au tutorat dans le travail temporaire

Par ailleurs, l’article 4.2 « l’organisation de tutorat » laisse une inconcevable liberté quant au contenu des objectifs du contrat que seront amenés à élaborer les acteurs de la relation tripartite (l’entreprise utilisatrice, l’entreprise de travail temporaire et le tuteur). Ce manque de cadre structurant est à la fois inhabituel et préoccupant. Ce n’est malheureusement pas le recours à la Commission Paritaire Nationale pour l’Emploi (CPNE) invoquée dans le texte qui permettra de lever notre préoccupation, puisque cette commission ne se bornerait qu’à reprendre les éléments listés dans la proposition de l’accord.

Là encore, refus du Prisme d’avancer sur un point pourtant essentiel.

Indéfinition de la formation à la fonction de tuteur

Idem pour l’article 6 « une formation obligatoire », dont le flou laisse la possibilité d’une prolifération incontrôlée de différentes formations au tutorat, et qui va à l’encontre de notre conception d’un cadre préliminaire commun à l’ensemble de ce type de formation.

Les carences de fond du projet d’accord, en regard des enjeux du tutorat, ne permettent pas à la CFTC d’apposer sa signature au texte

Ainsi, la CFTC ne retrouve pas les éléments structurants qu’elle attend d’un accord pour qu’il soit à la hauteur du sujet du tutorat, et a fortiori d’un accord de mise en œuvre d’un tutorat intérimaire. C’est pourquoi la CFTC ne signera pas la proposition d’accord, les insuffisances du texte sur ce sujet du tutorat n’étant pas compatibles avec son introduction dans la branche du Travail Temporaire.

Nous trouvons fort regrettable, une fois de plus, alors que notre branche aurait pu servir d’exemple aux autres branches d’activités, que les partenaires sociaux se soient heurtés sur ce sujet à une logique de seul profit, plutôt que la recherche du minimum requis en matière d’aide à l’insertion et à la formation des salariés. Cette question est pourtant essentielle pour les entreprises en général et pour les entreprises de travail temporaire en particulier, comme indiqué en début de l’article 2.3 de l’Accord du 30 novembre 2009 relatif à l’emploi des seniors.