Les représentant CFTC Manpower ont abordé la négociation égalité hommes-femmes 2013 des salariés permanents dans l’entreprise Manpower France à travers plusieurs angles :

  • identification des facteurs clefs d’inégalité que l’employeur, volontairement ou non, refuse d’aborder en dépit de leur importance ;
  • propositions de mesures concrètes pour suivre et réduire ces déviances et déséquilibres internes à l’entreprise.

Déséquilibre du recrutement sur les niveaux inférieurs, surféminisés

Faute d’indicateur, il est pour le moment impossible de comprendre si la cause de la surféminisation du recrutement des niveaux inférieur est dû :

  • soit à des décisions sexistes de l’employeur au moment des procédures de recrutement ;
  • soit un déséquilibre démographique des candidatures, qui peut lui-même s’expliquer par d’autres causes : déséquilibre démographique dans les filières de formation initiale où sont recrutés les salariés de l’entreprise, la faiblesse des rémunérations proposée sur les niveaux inférieurs en regard des niveaux d’étude bac+2/bac+3 demandés (voir notre article précédent sur le développement de la pauvreté salariale de salariés dans l’entreprise), etc.

La CFTC a donc demandé à l’employeur qu’il objective les forts déséquilibres démographiques en analysant la répartition H/F des candidatures dans l’outil de recrutement (l’information doit pouvoir être enregistrée à défaut d’apparaître ensuite lors de la recherche et consultation des profils) : c’est la seule manière d’objectiver le caractère non discriminant des pratiques de recrutement Manpower, et pour commencer de pouvoir analyser s’il y a matière à action à reconsidérer certaines pratiques à l’embauche.

Plafond de verre niveau 5A pour les femmes

Alors même qu’un très net plafond de verre existe pour les promotions de femmes entre les niveaux 5A (où elles sont sureprésentées et subissant des délais avant promotion plus longs que les hommes) et 5B (où elles sont sous-représentées), l’employeur prétend agir au-dessus, là où aucun déséquilibre de promotion patent n’est décelable, et où le nombre de promotions devient totalement marginal...

Sur ce sujet, la CFTC a identifié un facteur de discrimination très présent dans l’entreprise, où les femmes se voient demander systématiquement de quitter un temps partiel pour pouvoir évoluer vers le niveau 5B, au motif qu’un responsable se doit d’être à temps plein pour tenir son poste.

Outre que l’employeur Manpower ne s’embarasse jamais de ce principe lorsque des hauts cadres, voir le Président, portent de multiples fonctions en dehors de l’entreprise (syndicale Prisme ou Medef, conseils d’administration et/ou de surveillance dans de multiples sociétés hors du groupe, etc), ce verrou est parfaitement illégal. [1]

La CFTC a donc demandé à l’employeur :

  • de travailler à des solutions de débloquage du plafond deverre 5A pour la promotion des femmes, que ce soit par de l’accompagnement, de la formation ou quelle que mesure que ce soit, car il n’est pas acceptable de considérer que les femmes 5A sont moins performantes que les hommes pour progresser vers le niveau 5B ;
  • de travailler à une solution de débloquage en fait de ce verrou du temps partiel pour autoriser l’évolution professionnelle, ainsi que l’arrêt des pressions sur les personnes pour conditionner leur évolution professionnelle à un abandon de leur temps partiel.

Inéquités d’évaluation des atteintes d’objectifs

L’employeur n’a sur ce sujet voulu produire aucun indicateur, et pour cause, obligeant les représentants CFTC à travailler sur des croisements de données. Alors que les évaluations professionnelles sont portées par l’employeur à travers les dogmes de la soit-disante évoluation « par la performance », réalisée en roue libre par application du principe d’ « infaillabilité managériale » sans aucun contrôle ni régulation de la DRH, le résultat en est édifiant :

Réseau opérationnel :

  • Les chargés de recrutement hommes (16 personnes) sont évalués comme atteignant 1/3 en moins leurs objectifs comparés aux femmes (356 personnes) ;
  • Les hommes sont a contrario évalués plus favorablement que les femmes dans les 2 niveaux supérieurs du réseau opérationnel :
  • les directeurs d’agence femmes (29) sont évaluées comme atteignant 1/5 en moins leurs objectifs comparés aux hommes (24) ;
  • même phénomène avec les directeurs de secteur femmes (13), qui sont évaluées comme atteignant 1/4 en moins leurs objectifs comparés aux hommes (17).

Personnels fonctionnels :

  • Les employés de niveau 3 et 4 femmes (104) sont évaluées comme atteignant 1/3 en moins leurs objectifs comparées aux hommes (32) ;
  • Beaucoup plus lourdement sur les fonctions supérieures, où les cadres de niveau 6B femmes (12) sont évaluées comme atteignant 2/3 en moins leurs objectifs comparées aux hommes (16) ;
  • Les niveaux intermédiaires sont inversement plutôt défavorables aux hommes, notamment pour les cadres de niveau 5B hommes (78) qui sont évalués comme atteignant 1/5 en moins leur objectifs comparés aux femmes (127).

Quels qu’en soient la (les) causes, ces inéquités de rémunérations sont complètement incompatibles avec un affichage de maîtrise de la gestion de la performance (ce qui génère ressentiment, inefficacité économique pour l’entreprise, etc).

La raison de ces écarts doit être analysée, pour identifier et mettre en oeuvre les mesures correctives nécessaires :

  • origine de la qualité H/F -> intervention de la RH pour rééquilibrages individuels des évaluations lors des revues RH ;
  • origine métier/secteur géographique + déséquilibre démographique H/F sur le métier -> intervention de la RH pour rééquilibrages collectifs des évaluations (géographiques et/ou directions en fonction de l’origine) lors des revues RH.

Comme les statistiques présentées ont exclus les personnes à temps partiel, vérifier que ces personnes (essentiellement féminines) ne sont pas désavantagée nécessite de créer un indicateur incluant les personnes à temps partiel, mais redressant les données au prota temporis.

Au vu des écarts discriminant d’atteinte des obajectifs, la CFTC a donc réitéré également sa demande d’indicateurs spécifiques dans le bilan égalité, et une prise en compte du sujet pour action (plan d’action, accord).

Autres propositions et demandes de la CFTC pour favoriser l’égalité hommes / femmes dans l’entreprise Manpower

  • Déclinaison des objectifs au niveau des établissements, puis des différents RRH, au vu de la disparités des situations et de la nécessité d’agir concrètement conformément au plan.
  • Faciliter la maternité :
  • possibilité pour la salariée de réduire son temps de travail quotidien de 20 minutes passé le 5e mois de grossesse ;
  • entretien avant et après le congé maternité ;
  • sur la base de ces entretiens, organiser envoi d’information institutionnelle lors du congé, des délais de réintégration horaires, objectifs individuels, besoins d’accompagnement, formation, etc, afin de ne pas renvoyer la personne « au feu » comme si de rien.
  • Mettre en place un accompagnement et une réintégration en doublon lors du retour suite à une absence de plus de 6 mois (congé parental, etc), avec également un entretien en début et fin de congé.
  • Mener une réflexion télétravail.
  • Instaurer une pratique effective de récupération des temps de trajet pour la formation (information + formalisation, ce motif devant apparaître dans le portail RH), favoriser des cessions de formation dans les grandes villes en région plutôt qu’une centralisation tout Paris et favoriser la formation en ligne.
  • Prévoir un remboursement des frais de garde de jeunes enfants au prorata de la durée de formation, éventuellement sur critères sociaux pour limiter le budget (mais pas en demandant à la personne de justifier de sa situation de famille comme l’année dernière) + être transparent l’année prochaine sur le nombre et le budget de remboursements qui aura été engagé (les mesures doivent être utiles et correctement dimensionnées) ; idem pour tout autre événement à l’initiative de l’entreprise, ainsi que mobilité provisoire.
  • Prévoir un complément paternité (actuellement 84% sécurité sociale) + être transparent l’année prochaine sur le nombre et le budget que la mesure aura représenté (les mesures doivent être utiles et correctement dimensionnées).
  • Faire un effort sur les rémunérations, de manière à attirer les candidats hommes et à ne pas décourager les femmes.
  • Engager la négociation égalité 2014 plus tôt l’année prochaine.

Voir aussi :