Alors qu’une réorganisation majeure de l’entreprise s’annonce de manière imminente, les syndicats CGT, CGT-FO, CFE-CGC, UNSA et LADI (Les Anonymes de l’Intérim) se sont alliés afin d’exclure le Comité d’Établissement (CE) du Siège de toute représentation au Comité Central d’Entreprise (CCE) !

Pourquoi le CE du Siège est-il visé par certains syndicats ?

Les syndicats CGT, CGT-FO, CFE-CGC, UNSA décisionnaires de l’accord qui a entériné cette situation, avaient initialement entamé une démarche de partage syndical des postes du CCE. Les syndicats CFTC, CFDT et Sud (et initialement LADI) avaient rejeté cette manœuvre purement syndicale, du fait que la répartition se faisait au détriment de l’intérêt général et des salariés :

  • un CE Sud-Est sous représenté du fait de son émancipation des influences syndicales dans son fonctionnement : seulement 5 représentants au CCE alors qu’il regroupe 60% de salariés en plus que le CE Est, qui lui aurait été représenté par 7 représentants au CCE !
  • un seul représentant pour le CE Siège au CCE (sur 40 représentants).

C’est pourquoi, la CFTC avait alors initié un recours administratif soutenu par Sud et la CFDT (et LADI), qui a de fait donné droit aux principes qu’elle soutenait :

  • fixant à 2 les représentants du CE Siège,
  • allouant le reste des représentants en fonction des règles légales, en respect de l’équité démographique : « le nombre de siège attribué à chaque établissement doit permettre une représentation proportionnelle des effectifs de ces établissements ».

Problème : l’administration n’a pas intégré dans sa répartition toutes les conséquences des spécificités de l’intérim, qui établit des équilibres entre collèges afin d’éviter que certains n’en soient exclus ; du fait du poids des salariés intérimaires dans le réseau, il a alors attribué au CE Siège 2 postes ouvriers/employés, alors que celui-ci est composé de 80% de cadres et assimilés et que les mandats de représentation des ouvriers/employés y sont en carence !

La CFTC fut alors contacté par les autres centrales syndicales notamment la CGC, qui tenta de désolidariser la CFTC du reste des opposants à l’accord en lui proposant les deux sièges qu’elle réclamait pour le Siège, mais sans revenir sur la répartition inéquitable des autres mandats. Fidèle à ses principes, la CFTC refusa.

Les organisations syndicales se retrouvèrent alors pour une ultime séance de négociations où l’on vit les représentants LADI basculer (pour quelle raison ?) dans le camp CGT, FO, CGC et UNSA. Dès lors, la majorité pour la signature de l’accord était acquise, scellant définitivement une répartition injuste des postes au CCE et une absence de représentation des cadres et agents de maîtrise du Siège.

Pourquoi une coalition syndicale CGT, CGT-FO, CFE-CGC, UNSA et LADI se comporte-t-elle ainsi ?

Comment des organisations syndicales, qui se targuent de défendre les intérêts des salariés, peuvent-elles entériner un tel accord ?
Fidèles à une culture d’entreprise d’enveloppes syndicales et de crédits d’heures gracieusement octroyés par la direction, certains syndicats sont incités à se perdre dans leurs intérêts personnels et des jeux d’appareil, oubliant que le sens de leur action se trouve avant tout auprès des collègues salariés.
Les instances représentatives (CE, CCE, CHSCT), ne sont pour eux que des instruments pour y asseoir et y démontrer leur puissance, contre laquelle ils savent qu’ils obtiendront compensation de la part d’une direction reconnaissante, s’ils l’exercent de manière entendue.
C’est ainsi que, à titre d’exemple, des centaines de salariés permanents des établissements du réseau ont perdu leur emploi depuis 2008 (Refondation) sans aucun accompagnement collectif, ce qui constitue une honte syndicale et représentative pour l’entreprise : au lieu d’organiser une chasse aux CE où ils sont le moins implantés, la CFTC invite les syndicats dont il dénonce les dérapages, à s’intéresser plutôt à traiter les problèmes des salariés où ceux-ci leur ont confié une mission de représentation pour ce faire !

Dans le cas présent, ces syndicats CGT, CGT-FO, CFE-CGC, UNSA et LADI ont puni le CE Siège pour deux raisons : affirmer leur puissance d’appareil, mais également, parce qu’ils ne peuvent comprendre la différence entre syndicat et CE, punir le syndicat CFTC qui y est très présent, comme s’il s’agissait de la question posée s’agissant de la constitution d’un CCE !? L’intérêt général et celui des salariés est alors totalement absent de leur décision, comme à l’accoutumée.

De son côté la direction, représentée par la direction des Affaires Sociales et la direction Droit Social, qui a également signé l’accord, y trouve son bénéfice :

  • elle évince du CCE une équipe d’élu CE Siège performante,
  • en particulier, à un moment où elle s’apprête à devoir y traiter des projets qui vont aussi concerner les salariés du siège au premier chef.

Quelle ironie, quelle incohérence et quel cynisme de la part de la direction (et des syndicats CGT, CGT-FO, CFE-CGC, UNSA et LADI qui se montrent complices), qui prétendait encore il y a quelques mois imposer un CE unique, au soi-disant motif que tout ce qui se passait dans l’entreprise relevait du Comité Exécutif et des fonctions centrales du siège ! Certes elle n’avait évidemment pas eu gain de cause auprès du Ministre, mais de là à affirmer aujourd’hui par sa signature qu’il ne se passe tellement plus rien au siège que cet établissement pourrait totalement disparaître du CCE, il y a un pas que la CFTC se refuse de franchir !

Que va faire la CFTC ?

En concertation avec le CE Siège (et les syndicats CFDT et Sud s’ils le souhaitent), la CFTC va :

  • accompagner le CE Siège, si tel est son choix, dans une contestation judiciaire de son absence de représentants au CCE, en dépit d’une composition supra légale de 40 membres ;
  • poursuivre son travail d’émancipation de la représentation des salariés de l’entreprise, afin que tous les salariés puissent se reconnaître dans leurs instances représentatives ;
  • poursuivre son dialogue avec les syndicats CGT-FO, CFE-CGC, UNSA et LADI en dépit de leurs errements, afin qu’ils reprennent leurs esprits.

Salariés : Les représentants du personnel sont un bien commun car d’eux dépendent les conditions de travail et l’emploi ! Chacun participe à leur choix à l’occasion des élections professionnelles, qui sont un moment d’enjeu crucial pour tous les salariés.


Ajout du 16/04/2013 : Les logiques d’appareil CGC et CGT prises à leur propre piège du rapport de force

La logique de conflit entretenue à l’encontre de la CFTC par certains responsables et appareils syndicaux auxquels la CFTC s’est heurtée, a finalement trouvé ses limites :

  • Par courrier du 29/01/2013, après mises en demeures préalables formelles de la CFTC auprès de l’employeur qui n’a pas donné suite, des complaisances hors cadre légal et conventionnel entre l’employeur Manpower et la CGT Manpower ont fait l’objet d’un signalement auprès du Procureur de la République de Nanterre ;
  • Le 03/04/2013, la CFTC a obtenu devant le Tribunal d’Instance de Puteaux (RG n°11-12-001022) l’annulation du scrutin du CE Ouest pour la désignation du CCE, après que l’employeur, la CGC Manpower et la CGT Manpower aient notamment de concert voulu abusivement (et inutilement du point de vue de leur strict intérêt) écarter une candidature CFTC ;
  • À la suite de cette annulation, le 15/04/2013 le délégué syndical central CGC Manpower et le Secrétaire Général du Syndicat CGT Manpower, acteurs majeurs de la problématique judiciaire de constitution du CCE, après des échanges de courriels les impliquant où leur volonté de rapport de force à l’encontre des représentants CFTC Manpower était réaffirmée, ont perdu leurs mandat d’élus au CCE Manpower [1].

Au passage la CFTC obtient dans l’immédiat 4 mandats supplémentaires de représentation des salariés au CCE Manpower. Elle réitère également son appel à un changement de mentalités au sein des appareils syndicaux de la représentation du personnel Manpower.

À plus long terme, au delà du simple épisode du scrutin Ouest, la CFTC a porté devant la Cour de Cassation le problème plus général des règles de constitution du CCE. Les règles de constitution du CCE ne trouvera donc son véritable épilogue juridique qu’à long terme, puisque le résultat n’est pas attendu avant de longs mois.


Voir également :